Loi Badinter et assurance auto : ce qu'il faut savoir

Frédérique Robin, journaliste assurance

5 min


MAJ mai 2023

Les victimes d’un accident de la route bénéficient d’une protection particulière dans le cadre de la loi Badinter. Elles peuvent notamment bénéficier d’un droit à indemnisation, et sous réserve de réunir plusieurs conditions. MAIF décrypte ce texte de loi incontournable si vous êtes un jour victime d’un sinistre routier.

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Loi Badinter et accident de la circulation : définition

Le 5 juillet 1985, Robert Badinter, ministre de la Justice de François Mitterrand, contribue à faire voter une loi destinée à mieux protéger les victimes en cas d’accident de la route. Grâce à ce texte :

  • les victimes peuvent bénéficier, sous conditions, d’un droit à indemnisation automatique,
  • leur indemnisation se veut plus rapide grâce à la mise en place de nouvelles procédures.

En effet, rappelons qu’avant le vote de la loi dite « Badinter », de longs débats contradictoires étaient nécessaires entre les parties afin d’établir les responsabilités. Débats au cours desquels il revenait aux victimes de démontrer qu’elles n’étaient pas à l’origine de l’accident pour obtenir une indemnisation.

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Quand s'applique la loi Badinter du 5 juillet 1985 ?

Victimes d’un accident de la circulation impliquant un véhicule terrestre à moteur, vous disposez d’un droit à indemnisation. Sous quelles conditions ?

La présence d’un véhicule terrestre à moteur en circulation

Condition à l’application de la loi Badinter : l’accident de la circulation doit impliquer un « véhicule terrestre à moteur » (VTM).
Autrement dit :

  • les voitures et les remorques qui pourraient y être attelées (une remorque dételée du véhicule tracteur, elle, n’entre pas dans la catégorie des VTM),
  • les motos,
  • les engins de chantiers et de manutention (bulldozer, pelle mécanique, charriot élévateur…),
  • les engins agricoles (moissonneuse-batteuse, tracteur…).

La loi Badinter exclut en revanche les véhicules terrestres à moteur circulant sur une voie ferrée qui leur est propre (tramways, train, métro…).

Par ailleurs, le véhicule terrestre à moteur doit être « en circulation » aux yeux de la loi, c’est-à-dire :

  • en mouvement, y compris de manière involontaire (mise en marche accidentelle d’une voiture…),
  • mais aussi immobile (à l’arrêt, en stationnement, en panne…) dès lors qu’il se trouve sur une voie publique.

La survenue d’un accident de la circulation

La loi Badinter concerne les accidents de la circulation. D'après la jurisprudence, est considéré comme "accident" un événement fortuit et imprévisible. Plus concrètement, une vicitime qui aurait cherché à provoquer les dommages (intention suicidaire par exemple) ne pourrait pas prétendre à une indemnisation sur la base de la loi Badinter.

Dans la même logique, sont aussi exclus de la loi Badinter les sinistres causés alors que leur auteur, unique responsable de l'accident, ne pouvait pas ne pas ignorer les conséquences de son action. Ce serait le cas par exemple pour une personne en panne sur l’autoroute, de nuit, sortie de son véhicule sans équipements permettant de la rendre visible et marchant sur la voie la plus rapide, alors qu’elle aurait dû avoir conscience du danger (jurisprudence). 
Par ailleurs, la loi Badinter précise qu’il doit s’agir d’un accident de la circulation : 
Autrement dit, cet accident doit intervenir sur une voie de circulation qui peut être aussi bien publique que privée :  

  • Routes publiques,
  • Parkings privés ou publics,
  • Voies privées. 

Cette définition très large des voies de circulation n’exclut qu’un cas de figure : les circuits fermés de compétition… 
Cet accident doit être lié à un "fait de circulation" : ainsi, un accident causé par la seule fonction outil d'un engin quelconque n'est pas un accident de la circulation.

La nécessaire implication du véhicule

Enfin, la loi Badinter suppose l’implication d’un véhicule terrestre à moteur.
Ici, peu importe que le VTM soit la cause ou non de l’accident. Il suffit qu’un véhicule terrestre à moteur (et ce qu’il transporte) participe de quelque manière que ce soit, activement ou passivement, à la production du dommage pour être considéré comme « impliqué ».

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Quelles sont les conditions d'indemnisation des victimes ?

Les règles d’indemnisation fixées par le législateur varient selon la nature des dommages (matériels ou corporels) et en fonction de deux catégories de victimes, elles aussi déterminées par la loi Badinter :

  • les conducteurs, à savoir ceux qui se trouvaient au volant d’un véhicule terrestre à moteur ou qui avaient la maîtrise de ce dernier. 
  • les non-conducteurs : les piétons, les cyclistes, les passagers d’une voiture (voyageant à titre gratuit ou onéreux)…

Indemnisation des dommages matériels

Du point du vue des dommages matériels subis par votre véhicule, votre vélo ou vos biens personnels, peu importe que vous soyez conducteur, cycliste, piéton… : l’indemnisation dépend de votre niveau de responsabilité. Celle-ci peut ainsi être réduite ou exclue si vous avez commis une faute ayant contribué à la production du dommage.

Indemnisation des dommages corporels des non conducteurs

C’est sur les dommages corporels que la loi Badinter met l’accent. Et dans ce cas de figure, les victimes non conductrices sont particulièrement protégées.
Grâce à la loi Badinter, les victimes non conductrices reçoivent une indemnisation totale (frais de santé...), sauf si :

  • la victime a volontairement recherché le dommage subi (dans le cas d’une tentative de suicide par exemple),
  • la victime a commis une faute inexcusable qui est aussi la cause exclusive de l’accident. Il s'agit généralement d'un cumul de fautes telles que le fait pour un piéton de surgir brusquement sur une chaussée interdite aux piétons en pleine nuit, sans raison valable (sous réserve que cette action soit bien la cause exclusive du sinistre, jurisprudence) ou emprunte une voie qui lui est interdite (telle qu’une autoroute) alors même que des signalétiques alertent du danger (jurisprudence). Autre exemple de faute inexcusable : un vélo franchissant des feux rouges et circulant à contresens sur différentes voies publiques (jurisprudence).

Sachant que le principe de la faute inexcusable ne peut en aucun cas être retenu contre les victimes dites « victimes protégées », à savoir les personnes qui, le jour de l’accident :

  • étaient âgées de moins de 16 ans ou de plus de 70 ans,
  • ou qui justifiaient d’une invalidité au moins égale à 80 %.

Indemnisation des dommages corporels des conducteurs (article 4 loi Badinter) 

Pour les conducteurs, l’indemnisation en cas de dommages corporels dépend de leur responsabilité dans la production du sinistre. Elle peut être exclue ou réduite dès lors qu’ils ont commis une faute. Le législateur considère en effet que même victime, un conducteur dispose du contrôle, de l’usage et de la direction de son véhicule.
Pour mieux comprendre, voici quelques exemples tirés de la jurisprudence et dans lesquels le conducteur a été reconnu fautif, excluant le droit à indemnisation :

  • non-respect des limitations de vitesse pendant un dépassement (jurisprudence),
  • perte de contrôle du véhicule due à un défaut d’attention (jurisprudence),
  • passage d’un conducteur à un feu orange alors qu’il était possible de s’arrêter dans des conditions suffisantes de sécurité (jurisprudence),
  • empiètement sur la voie de gauche pour éviter un obstacle, alors que la voie de circulation était suffisante (jurisprudence).

Á noter

Seule l'éventuelle faute du conducteur victime doit être examinée : le comportement de l'autre conducteur n'a, en principe, pas à être pris en compte.

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Qui indemnise en cas d'accident de la route ?

Comme pour tout sinistre, il est fortement recommandé de remplir un constat amiable, idéalement sur place pour décrire au mieux les dommages et préciser leurs causes. Vous disposez ensuite de 5 jours pour prévenir votre assureur : la déclaration d’accident est un pré-requis à la procédure d’indemnisation.

A savoir

Si plusieurs véhicules sont impliqués dans l’accident, le Code des Assurances prévoit que les différents assureurs mandatent l’un d’entre eux pour mener les procédures d’indemnisation des victimes.

Dans tous les cas, une fois le dossier pris en charge :

  • l’assureur doit tout d’abord informer les victimes de leurs droits (obtention gratuite du procès-verbal dressé par la gendarmerie ou la police…). Le cas échéant, il précisera avec elles les conditions du sinistre (description des dommages, identification des victimes…). Selon la gravité des faits, un examen médical peut être demandé,
  • l’assureur est ensuite tenu d’adresser aux victimes une offre d’indemnisation, dans un délai maximum de 8 mois après l’accident. Cette offre peut avoir un caractère provisoire si l'assureur n'a pas été informé de la consolidation de l'état de la victime dans les trois mois qui suivent le sinistre. Dès qu'il en a connaissance, une offre définitive d'indemnisation doit alors être émise dans un délai de 5 mois.

Les victimes ont alors plusieurs possibilités :

  • elles peuvent refuser la proposition si elles la jugent insuffisante par exemple, et demander une nouvelle offre,
  • elles peuvent accepter l’offre d’indemnisation, auquel cas l’assureur a 45 jours pour procéder à son règlement.

À noter

Si le véhicule à moteur impliqué n’est pas assuré ou n’est pas identifié, c’est le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) qui pourra, sous conditions, être saisi en vue d'une indemnisation totale ou partielle.

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Où se trouve la loi Badinter dans le code civil ?

La loi Badinter est venue modifier ou créer plusieurs articles au sein du Code civil mais aussi du Code des assurances et du Code rural.
Le texte est consultable en intégralité sur le site Légifrance (loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation).

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