Homme à la mer : quels gestes à adopter ?

Laurence Begaudeau-Boyer, plaisancière

12 min


MAJ février 2023

La chute d’un équipier ou d’un passager à la mer avec, ou non, la possibilité de pouvoir le remonter à bord rapidement n’est pas anodine. Il est primordial d’apprécier au plus vite l’état de conscience de la personne afin de définir la méthode de récupération la plus adaptée à la situation.

1
Les méthodes de récupération d’homme à la mer

Il n’existe pas une seule méthode de récupération de l’homme à la mer mais nombreuses sont celles qui vont vous permettre de sauver la vie d’une personne qui pourrait rapidement être victime d’une noyade ou même d’hypothermie.

Les méthodes doivent reposer sur un ensemble d’actes réfléchis et réflexes pour garantir la récupération de l’homme à la mer avec rapidité et efficacité qu’il soit conscient ou inconscient. Même pour un équipage entrainé, on considère qu’il va perdre environ 50 % de ses moyens devant une telle situation, alors imaginez sans entrainement avec un équipage de débutants.

Enfin, une fois l’homme à la mer récupéré et de nouveau à bord, il est important de pouvoir dresser un bilan rapide et si besoin d’organiser une évacuation vers une structure adaptée pour les soins.

2
Homme à la mer conscient

Un homme à la mer qui a chuté est très souvent conscient, la chute étant le résultat d’une perte d’équilibre, d’une fatigue de fin de quart de nuit…

Il existe 3 liens qui permettent assurément de maintenir en vie un homme à la mer :

  • Le lien visuel est celui qui vous permet de garder le contact.
  • Le lien psychologique vous permet de rassurer et d’être rassuré.
  • Le lien physique, vous donne la possibilité de remonter à bord l’homme à la mer.

Criez « homme à la mer ! »

Le témoin de la chute de l’homme à la mer devient le lien visuel, il doit pointer avec sa main en direction de l’homme à la mer jusqu’à la récupération finale. L’expérience montre qu’une fois le lien visuel rompu, il est quasiment impossible de le retrouver surtout lorsque certains éléments comme la nuit, les vagues viennent se rajouter. Garder le contact permet de rassurer par la voix de l’équipage mais également être rassuré par celle de l’homme à la mer.

Mobilisation de tout l’équipage

Ne pas céder à la panique et laisser la personne à bord la plus apte à organiser la récupération. Une seule personne doit parler, jamais tout le monde en même temps.

Le chef de bord coordonne toute l’action de récupération de l’homme à la mer.

Mettre le bateau en panne, à la cape et démarrer le moteur (le barreur)

La mise à la cape permet de stopper efficacement le bateau afin de rester à proximité immédiate de l’homme à la mer. A ce moment précis, vous marquez un temps de pause de quelques secondes nécessaires à la réflexion et apprécier l’état de conscience de l’homme à la mer.

L’homme à la mer doit pouvoir se reposer sur les facultés de l’équipage à le récupérer en toutes circonstances.

L’équipage doit constamment parler à l’homme à la mer en lui indiquant comment va se dérouler la manœuvre.

Parfois, même en fonction de l’allure initiale du bateau, le simple fait d’avoir arrêté le navire à voile par la mise à la cape permet à l’homme à la mer de rejoindre seul le bateau en nageant dans la bonne direction.

Lancer la bouée couronne ou la perche IOR (un équipier)

Cette manœuvre permet de baliser la zone de recherche et de récupération. De nuit, le feu à retournement facilite la manœuvre et permet un point de rassemblement du bateau et de l’homme à la mer. La perche IOR, du fait de sa conception aide l’homme à la mer de pouvoir retrouver l’engin flottant et le point de rassemblement dans les vagues.

Equiper l’homme à la mer d’un gilet muni d’une lampe individuelle flash ou autres moyens lumineux permet une meilleure visibilité surtout de nuit.

Appuyer sur la touche MOB de votre GPS (un équipier)

Sur votre GPS traceur, l’action d’appuyer sur la touche MOB (Man Over Board) permet de mémoriser la position pour pouvoir revenir dans la zone où est tombé l’homme à la mer.

Noter les coordonnées GPS (un équipier)

Noter les coordonnées GPS permet également de pouvoir revenir dans la zone de recherche si vous n’êtes pas équipé de GPS traceur et cela facilite la coordination de l’action de sauvetage par les secours en mer.

Alerter les secours (chef de bord)

Dans le cas où le lien visuel a été rompu mais également dans le cas où vous n’êtes pas en mesure d’effectuer la récupération, il est primordial de faire rapidement entrer en action les secours extérieurs, voire même d’autres navigateurs dans la zone de recherche.

Un message d’urgence de type « PAN PAN » ou « MAYDAY » si la vie de l’homme à la mer est engagée doit rapidement être passé à la radio VHF CANAL 16 afin de garantir l’alerte et l’action des secours extérieurs.

Mettre en œuvre un moyen de récupération (un équipier)

Il s’agit d’utiliser l’échelle du bateau, une gaffe, une amarre… pour aider l’homme à la mer à remonter à bord s’il est conscient et qu’il en est physiquement capable.

Le port du gilet de sauvetage joue un rôle primordial dans le lien psychologique et le lien physique

Dresser un bilan vital (chef de bord ou équipier)

Il peut être important de vérifier la bonne santé de votre homme à la mer afin que la situation ne se dégrade pas.

3
Homme à la mer inconscient

Certaines chutes à la mer peuvent assommer ou provoquer le coma. Comme par exemple, pour une personne ne sachant pas nager, sans équipement de flottabilité et se fatiguant, cela peut amener à la noyade, mais aussi à la fracture du rachis cervical lors d’une chute à grande vitesse du navire, tout comme le passage de la bôme d’un voilier peut occasionner un traumatisme crânien.

Nous avons vu qu’il était important d’apprécier l’état de conscience de l’homme à la mer rapidement et le simple fait de ne pas l’entendre crier, ni même bouger. Souvent la face du visage vers le fond de l’eau doit vous amener à réagir de manière réflexe et utiliser la méthode de récupération la plus adaptée au vu de la situation.

Naturellement, l’homme à la mer ne viendra pas vers vous et c’est à l’équipage de s’organiser pour venir au contact afin de procéder à sa remontée à bord. Autant vous dire qu’il n’est pas simple d’intervenir sur un poids mort et que les voiliers vont avoir un avantage sur les bateaux à moteur par l’utilisation d’une drisse par exemple pour hisser l’homme à la mer inconscient.

Pour un bateau à moteur, il suffit de se placer au vent de l’homme à la mer (entre le vent et la personne) et de le hisser à bord, la hauteur du franc bord peut compliquer la récupération et certains navires comme ceux de la SNSM sont équipés d’un mât de charge venant s’orienter au-dessus de l’homme à la mer pour le hisser à bord.

Pour un voilier, venir se placer au vent permettra d’attraper la victime inconsciente à condition qu’elle ait un gilet, sinon il faudra lui mettre un harnais afin de pouvoir la hisser soit avec une drisse, soit avec un palan dédié ou parfois en utilisant le palan de la grand-voile.

Souvent en fonction de la hauteur du franc bord, il est nécessaire de mettre un équipier à l’eau pour venir capeler l’homme à la mer. Cet équipier doit obligatoirement être attaché au bateau et avoir son gilet gonflé.

D’autres méthodes existent comme de le faire glisser dans une voile, ou même utiliser l’échelle de sauvetage appelée « Jason’s Cradle ».

Le voilier devra être à sec de toile (voiles affalées) à la phase finale de récupération afin d’avoir suffisamment de temps pour conditionner la remontée sans risque au moindre souffle de vent de voir s’éloigner l’homme, la femme ou l’enfant victime de la chute à la mer.

Si possible, surtout en cas d’hypothermie, l’homme à la mer devra être remonté le plus à plat possible et rester allongé ensuite pour éviter tout risque d’aggravation de son état physique.

L’alerte ayant été donnée au moment de la chute à la mer, il vous faudra aller chercher des consignes de prises en charge soit auprès du Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage en mer (CROSS) ou du Centre de Coordination Médical Maritime (CCMM) afin que soit mise en place une procédure pour sauver la personne victime du coma.

4
Trucs et astuces

Idéalement, ne pas tomber à l’eau permet d’éviter d’avoir à effectuer la manœuvre de récupération de l’homme à la mer. À partir du moment où vous mettez un pied sur un bateau, qu’il soit à voiles ou à moteur, le risque de chute à la mer est présent à tout instant.

Pour ce faire, quelques petits trucs et astuces pour se sortir de cette situation sans trop d’encombres.

  • Ne jamais penser que cela ne peut pas vous arriver.
  • Portez un gilet ! De nos jours, les gilets sont ergonomiques, légers et se gonflent automatiquement lors de la chute dans l’eau.
  • N’oubliez pas de vous capeler à la ligne de vie avec votre longe lors de certains déplacements sur le pont de jour et encore plus de nuit.
  • Sachez arrêter votre bateau, entraînez-vous à la mise à la cape pour les voiliers.
  • Entraînez-vous en équipage et même en équipage réduit, c’est important !
  • La connaissance parfaite des techniques peut vous apporter les gestes reflexes nécessaires à la manœuvre.
  • La bouée couronne n’est pas là par hasard. Elle doit être à poste, avec un feu de retournement opérationnel, prête à être larguée.
  • Privilégiez une perche IOR plutôt qu’un feu à retournement, bien plus visible dans les vagues.
  • Celui qui voit l’homme à la mer tomber, le pointe du doigt et ne le quitte plus jamais des yeux jusqu’à sa récupération.
  • Gardez votre calme, calmez votre équipage si nécessaire et vérifier qu’il n’y a ni bouts, ni écoutes, ni drisses qui trainent dans l’eau au risque d’aller s’enrouler autour de l’hélice.
  • Une seule personne doit orchestrer la manœuvre de récupération de l’homme à la mer.
  • Sachez utiliser la touche MOB, les moyens d’alerte et les procédures.
  • Ayez des connaissances en secourisme, au minimum le PSC1.

Côté MAIF

  • Votre bateau et ses équipements sont couverts suite à un événement climatique dès la formule au tiers.
  • Votre bateau prêté est assuré sans déclaration préalable.
  • Vous bénéficiez d’une assistance pour les personnes que vous embarquez et votre bateau.
  • Vous naviguez moins de 20 jours par an ? Avec l’assurance à la demande, activez vos garanties lorsque vous partez naviguer.

Sur le même thème

Quels sont les principaux risques en navigation ?

Les risques en navigation sont bien réels et souvent sous-estimés. Pour rappel, la mer reste un environnement hostile difficilement maîtrisable, encore plus quand les éléments se déchaînent.

Qu'est-ce que le rapport de mer et à quoi sert-il  ?

Le rapport de mer est le document officiel que tout chef de bord peut être amené à rédiger afin d'éclairer les circonstances d'un accident ou incident (corporel ou matériel) survenu à son bord, également appelé « événement de mer ».