Cas de jurisprudence

Éclats de billes
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Dossier réalisé par Frédérique Thomas, professeur agrégée, docteur en STAPS, Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand II, mise à jour octobre 2012.

Lors de la récréation un jeune élève est blessé par un éclat de bille projetée par terre. L'enseignant qui surveillait n'a pas été vigilant : il aurait dû confisquer les billes. La responsabilité de l'État substituée à celle de l'enseignant est retenue.

Les faits

Lors de la récréation de midi un jeune élève de cours moyen première année, s'amusait avec trois de ses petits camarades à lancer des billes par terre afin qu'elles se cassent. Il a alors reçu un éclat de verre dans l'œil. Il a été conduit à l'hôpital où deux interventions ont été nécessaires : la première en urgence pour suturer la plaie puis une seconde, deux jours plus tard, pour soigner une plaie au niveau du cristallin. À la suite de cet accident, le port de verres correcteurs a été prescrit.

Argumentaires des parties

Les parents de l'élève

Estiment que la surveillance effectuée par l'enseignant a été défaillante. L'interdiction posée par le surveillant n'a pas été respectée. Ils ajoutent que les billes auraient dû être prises aux enfants qui visiblement n'entendaient pas les consignes. Compte tenu de l'âge des élèves l'intervention de l'enseignant aurait dû être beaucoup plus ferme.

Le préfet

Substitué à l'enseignant et représentant de l'État, fait valoir que trois adultes veillaient sur les enfants au moment de l'accident et que l'un d'eux est intervenu pour leur demander de cesser le jeu. Les enfants ont repris le jeu malgré l'interdiction. Le jeune élève est donc responsable de son propre dommage.

La décision

L'enseignant qui surveillait cette récréation a ainsi témoigné : " P. s'amusait avec ses trois camarades à jeter des billes par terre afin qu'elles se cassent. P. a pris un éclat de verre dans l'œil. Il est venu immédiatement me voir, son œil saignait et je l'ai emmené tout de suite à l'infirmerie ". Avant que l'accident ne survienne, l'enseignant était intervenu pour interdire aux enfants de jeter des billes à terre. Compte tenu de leur petite taille, ils risquaient d'être atteints au visage par des éclats ricochant sur le sol. Malgré cette interdiction, les quatre enfants ont repris leur activité dangereuse dès que l'enseignant s'est éloigné. Sans leur confisquer les billes, il s'est contenté de leur interdire de jouer de cette manière. Or cette interdiction avait de grandes chances de ne pas être respectée par les enfants. L'enseignant n'a pas assez tenu compte de l'âge des enfants et de leurs activités pendant la récréation, en pensant qu'ils allaient s'arrêter de jouer. Au contraire dès qu'il est parti surveiller un autre groupe, le jeu a repris. Il eut été plus conforme à la situation de confisquer les billes. En partant surveiller un autre groupe d'élèves, l'enseignant a commis une faute de surveillance qui a permis la survenance de l'accident.

La responsabilité de l'État substituée à celle de l'enseignant est retenue.

Source : CA Grenoble, 2005