Cas de jurisprudence

La surveillance prise à défaut
Partage :
Alors que deux enfants de douze ans repliaient une lourde table de tennis de table, celle-ci retombe violemment sur la jambe de l’une des enfants.

Les faits

Il est démontré que lors du rangement des tables de tennis de table, le professeur avait imposé les consignes suivantes :

  • être à quatre pour déplier et replier la table,
  • ne pas se mettre sur les côtés de la table,
  • demander si tout le monde est prêt avant de descendre ou plier la table,
  • ne pas s’appuyer sur la table.

En fait, Caroline et Sophie ont pris la table chacune de leur côté et ont commencé à la lever. Caroline l’a lâchée car elle était trop lourde pour elle, alors que Sophie a continué de lever la table, ne sachant pas que son amie l’avait lâchée de son côté.
La table est ainsi tombée sur le bas de la jambe de Caroline, lui occasionnant une fracture.
Il est également acquis que l’accident s’est déroulé très rapidement, et qu’il n’a pas été vu par l’enseignant qui était en train d’aider d’autres élèves.

Argumentaires des parties

Les parents estiment que le fait que l’enseignant n’ait pas participé aux manœuvres de rangement et ne se soit pas assuré de la bonne application des consignes données est constitutif d’un défaut de surveillance, engageant la responsabilité de l’état, substituée à celle de l’enseignant.

Le préfet du département indique que l’accident est uniquement imputable au non-respect des consignes, pourtant précises, par les deux enfants.

La décision

L’enseignant ayant donné des consignes très précises, il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir participé à chacune des manœuvres de rangement, et de ne pas avoir délégué cette tâche à des agents de service, s’agissant d’une activité sportive usuelle. Le rangement du matériel nécessaire à la dite activité ne présentait pas de danger, à la condition :

  • que les élèves appliquent les consignes qui leur avaient été données, étant remarqué qu’il n’est pas prétendu que la jeune victime ne les avait pas entendues,
  • que les élèves soient correctement surveillés lors du rangement des matériels.

En revanche, dès lors que la manipulation des tables, en raison de leur poids, nécessitait la participation de quatre élèves par table, selon les consignes données par l’enseignant, il lui appartenait, s’agissant d’une préconisation imposée à des enfants seulement âgés de 12 ans, de surveiller chaque groupe afin de vérifier la mise en œuvre effective des consignes.

Or, en l’espèce il est établi que :

  • l’enseignant n’a pas procédé à une telle surveillance lors de la manœuvre des enfants
  • qu’il a cessé de surveiller l’ensemble de sa classe, pour participer lui-même à la manipulation d’une table,
  • qu’il s’est trouvé de ce fait, dans l’impossibilité de voir que les deux jeunes filles avaient omis de respecter les consignes de sécurité.

La preuve de la faute de l’enseignant étant indiscutablement rapportée, et ce défaut de surveillance étant directement à l’origine de l’accident, il y a lieu de retenir la responsabilité du préfet, substituée à celle de l’enseignant.

La responsabilité de l’État, substituée à celle de l’enseignant, est donc retenue.

Source : C.A. Poitiers 2013