Définition et responsabilités des mandataires sociaux des associations

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MAJ avril 2024

Avant d’aborder les notions de responsabilités des Mandataires sociaux, il est peut-être opportun d’essayer de rappeler simplement ce qu’est un Mandataire Social. En effet, au quotidien, on peut avoir tendance à qualifier de « Dirigeants » toutes les personnes qui gèrent, administrent, représentent ou contractent pour l’association. Mais sous cette « appellation » commune, on peut pourtant voir des différences de pouvoirs, par exemple, entre la Présidente ou le Président de l’association et la Directrice ou le Directeur Général de l’association…

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Dirigeant mandataire social : définition

Aucun texte ne définit les pouvoirs des Dirigeants d’association. La Jurisprudence en la matière précise que les Dirigeants de l’association sont les mandataires de celle-ci et, de fait, leurs relations sont régies par les dispositions du contrat de mandat.
Le mandat est donc un contrat aux termes duquel une personne (physique ou morale), appelé le Mandant, donne à une autre personne, le Mandataire, le pouvoir de faire, d’agir en son nom).
Plus simplement, on pourrait définir le Mandataire social comme la personne mandatée par l’association pour agir au nom et pour le compte de cette dernière, en exerçant sur celle-ci un contrôle effectif et constant, et ce, en toute autonomie.

Mais d’où le Mandataire Social tient-il ses pouvoirs puisque la loi 1901 ne définit en rien la nature de ces derniers ?
Toujours selon la jurisprudence, les relations entre les Dirigeants Mandataires de l’association et cette dernière sont régis par le contrat d’association. Ce sont donc les statuts de l’association qui vont déterminer les pouvoirs de gestion et de direction qui seront conférés aux Dirigeants.
En fonction des statuts, ces pouvoirs constants et effectifs vont être conférés :

  • Par un mandat que l’on appelle alors « un mandat spécial ». Ce dernier énumère alors de façon spécifique et précise quels sont les attributions, les pouvoirs du Dirigeant.
  • En l’absence de mandat spécial, par le biais d’un mandat dit « général » et on fait donc alors référence aux statuts de l’association pour définir ces derniers. Les statuts constituent en effet « la loi interne » de l’association. Ils déterminent alors les pouvoirs de direction et de gestion, fixent leurs modalités, leur contenu ainsi que leur répartition. Mais face à des statuts parfois laconiques en la matière, on considère alors que ces pouvoirs sont « cantonnés » aux seuls actes d’administration (c’est à dirie les actes de gestion courante), par opposition aux actes de disposition (par exemple la vente d’un bien immobilier de l’association).

Nous venons donc de définir, de manière très succincte, ce qu’est un Mandataire social de l’association.
Traditionnellement, les mandataires sociaux dits « de droit » (par opposition à la notion de Mandataire ou Dirigeant « de fait » que nous évoquons ci-dessous) sont, dans la plupart des cas, les membres du bureau de l’association (Président/te et le cas échéant vice- Président/te, Trésorier/ière, Secrétaire Général…).

A côté de ces mandataires sociaux de droit, la jurisprudence leur a assimilé, notamment en matière de responsabilités, ce que l’on appelle les Mandataires ou Dirigeants dits « de fait ».

A l’instar des dirigeants de droit, le dirigeant de fait exerce un contrôle constant et effectif dans la gestion de l’association (notamment vis des tiers), mais ce dernier n’est nullement désigné par les statuts et agit en dehors de tout mandat spécial.
Cette situation peut par exemple concerner un cadre Dirigeant (Directeur salarié) qui exercerait, dans les faits, de très nombreuses attributions, et ce en toute indépendance c’est-à-dire sans contrôle particulier de la part des instances statutaire.
Ainsi, si le cocontractant de l’association a pu légitimement croire (cette croyance légitime est laissée à l’appréciation souveraine des juges) que celui-ci agissait dans le cadre d’un mandat, l’association peut se trouver engagée par les actes de ce dernier.

Ce rappel opéré, qu’en est-il désormais de la responsabilité des Mandataires Sociaux, qu’ils soient de droit ou de fait, tout d’abord à l’égard des tiers, mais également à l’égard de l’association mandante ?

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Responsabilité des mandataires sociaux à l’égard des tiers

En la matière, et très simplement, considérons qu’il y a un grand principe qui prévaut, et quelques plus rares exceptions très fortement encadrées.

Le principe général qui prévaut est que le Mandataire Social étant, comme nous venons de voir, le représentant de l’association, ses actions, ses décisions, doivent être menées au nom et pour le compte de l’association. Dès lors, si tel est bien le cas, une éventuelle faute du mandataire social s’identifiera avec la faute de l’association elle-même. C’est donc la personne morale, l’association, qui devra répondre des fautes dont elle s’est rendue coupable par l’intermédiaire de son représentant, de son mandataire. C’est le principe de « l’écran protecteur » posé par l’article 1154 du code civil « lorsque le représentant agit dans la limite de ses pouvoirs au nom et pour le compte du représenté, celui-ci est seul tenu de l’engagement ainsi contracté ».

S’agissant de l’exception : à contrario, un mandataire social qui outrepasserait ses fonctions, qui agirait en dehors de l’objet social de l’association ou qui effectuerait sciemment un acte qui ne saurait être rattaché au fonctionnement de l’association, pourrait alors voir sa responsabilité personnelle engagée, « l’écran protecteur » de l’article 1154 ne fonctionnant plus puisque les actes dépassent la limites des pouvoirs du dirigeant, voire, son action a été menée pour son propre compte et non pour le compte l’association.
En résumé, retenons que pour que la responsabilité personnelle d’un mandataire sociale puisse être retenue il doit commettre une faute dite séparable de ses fonctions. Cette faute est définie par la jurisprudence comme une faute :

  • intentionnelle,
  • d’une particulière gravité,
  • incompatible avec l’exercice normal des fonctions (agir sciemment en dehors de l’objet social de l’association, outrepasser ses pouvoirs statutaires ou relevant d’un mandat spécial, agir dans son propre intérêt personnel, par malveillance ou en commettant une faute d’une extrême gravité…).

Précisons en outre, qu’au-delà des agissements que nous venons de citer, il importe également que deux autres éléments soient réunis en plus de cette faute personnelle séparable des fonctions du Mandataire social :

  • un préjudice subi par l’association,
  • un lien de causalité entre ce préjudice et la faute du mandataire social.

Quelques exemples pour illustrer des cas de fautes personnelles des Mandataire reconnues comme faute personnelles détachable des fonctions :

  • Le cas d’un trésorier d’association ayant volontairement émis des chèques sans provision, en ayant une parfaite connaissance de la situation financière de l’association. Un tel comportement ayant été jugé comme séparable des fonctions normales d’un trésorier.
  • En cas d’insuffisance d’actifs, un mandataire social pourrait être condamné à combler le passif sur son patrimoine propre s’il a commis certaines fautes de gestion (ex : Désintérêt total pour la gestion de l’association, absences répétées, défaut de déclaration de la cessation de paiement dans le délai légal…).
  • Conduire le CA à choisir des placements financiers à risque en raison de leur taux de rendement supérieur.
  • Céder un actif immobilier de l’association en dessous de son prix du fait de la non-consultation d’autres acquéreurs.

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Responsabilité des mandataires sociaux à l’égard de l’association mandante : notion de faute de gestion

Même si, en principe, l’association doit assumer, à l’égard des tiers, les conséquences d’éventuels préjudices subis par des décisions de ses mandataires, cela n’exclut pas le fait que ces derniers aient des « comptes à lui rendre » dans le cadre du contrat de mandat qui les lie à elle.

Si les statuts ou le mandat spécial définissent précisément l’étendue des pouvoirs, donc des obligations des mandataires, le non-respect de ces obligations peut constituer une faute et serait susceptible d’engager leur responsabilité à l’égard de l’association, sans que cette faute ne doive nécessairement revêtir le caractère séparable des fonctions (la faute simple peut suffire). Par faute de gestion il faut entendre le non-respect de la « mission » confiée par les statuts et/ou le non-respect de la notion de gestion « prudente et diligente ».

 

Exemple : un Président assigné en responsabilité par l’association et condamné au remboursement de certaines dépenses engagées, dépenses qu’il n’avait pas été en mesure de justifier.

Il faut tout de même rappeler qu’en la matière, les tribunaux, au regard de l’article 1992 du code civil, apprécieront la faute de façon moins rigoureuse lorsque le mandat est gratuit (bénévoles).

La loi n° 2021-874 en faveur de l’engagement associatif, dite loi Waserman, est venue atténuer la responsabilité financière des dirigeants associatifs qui pouvaient jusqu'ici être saisis sur leurs biens personnels en cas de faute de gestion. Mais attention, la responsabilité demeure. Seulement, le juge doit désormais considérer à la fois le statut de bénévole du dirigeant et examiner s'il disposait ou non de moyens pour éviter de commettre la faute. Ne sont concernées que les associations non assujetties à l’impôt sur les sociétés dans les conditions prévues au 1bis de l’article 206 du code général des impôts ( article L.651-2 du code de commerce).

C’est pourquoi il paraît important, pour ne pas dire indispensable que l’association aménage un accompagnement et une protection au profit de dirigeants dont l’engagement et la prise de responsabilité interviennent sans aucune contrepartie financière s’agissant des bénévoles, si ce n’est la satisfaction qu’ils peuvent avoir d’œuvrer pour l’intérêt général.

Cette protection peut intervenir au sein du contrat d’assurance de l’association en prévoyant une garantie « Responsabilité Civile des Mandataires Sociaux ». L’objet de cette garantie est de prendre en charge les conséquences pécuniaires de leurs responsabilités dans l’exercice de leurs mandat (y compris par exemple les conséquences financières d’une action en comblement de passif par exemple).

Notre point de vue d'assureur

Il convient cependant d’être très vigilant en la matière et de bien examiner les conditions d’octroi et d’intervention d’une telle garantie. En effet, on citera 2 points de vigilance régulièrement rencontrés dans une garantie RCMS :

  • Certains contrats n’octroient qu’une garantie de type « Défense » dont l’objet est la prise en charge des seuls frais de justice et d’avocat (les éventuels dommages et intérêts continuant d’être à la charge du Mandataire, sur son patrimoine propre, voire, ensuite à celle de ses ayants droit…).
  • Cette garantie constitue parfois une option. Ce qui peut paraître surprenant dans la mesure où dans la gouvernance d’une association, la présence de Mandataires sociaux ne constitue pas une option (sans au moins 2 mandataires sociaux représentant l’association, il n’y a tout simplement pas d’association !).

Côté MAIF

L’assurance multirisque associations inclut une garantie " responsabilité des dirigeants et mandataires sociaux ".