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L'école autrement

Troubles de la personnalité et scolarité
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Professeurs en terrain " Troubles ". Dans une classe, un élève sur huit en moyenne souffre de troubles, selon l’INSERM. Difficilement repérables, ils sont donc généralement dépistés tardivement.

Quelles formes peuvent revêtir ces pathologies ? Comment les déceler chez les plus jeunes ? Comment réagir face à ces élèves ? Comment les accompagner ? Quelles sont les aides précieuses ?

Eric Debarbieux et la Fédération des Autonomes de Solidarité ont mené une longue enquête dans plusieurs établissements scolaires, et ont sondé le personnel de l’Éducation nationale. Il ressort de cette étude - menée auprès de presque 12 000 personnes - que 37 % des professeurs reconnaissent avoir eu fréquemment des problèmes avec des enfants atteints de troubles de la personnalité. Ils s’estiment impuissants et désemparés face à ce genre de situation. Ils réclament des aides de spécialistes et surtout une formation solide pour pouvoir faire face. L’exemple qui suit nous montre à quel point le corps enseignant peut se trouver confronté à des symptômes souvent perturbants.

Nature ou vraie maladie ?

La méconnaissance des différents troubles est bien souvent le premier obstacle à l’action. Cette incapacité à agir peut entrainer des situations ingérables. C’est ce qui est arrivé à Delphine, professeur d’histoire dans un collège de proche banlieue parisienne. À la rentrée, sa direction lui apprend qu’elle va devoir gérer seule - pendant plusieurs semaines —, un élève atteint d’un trouble du comportement. " Je n’étais préparée en rien, j’ai dû subir l’agressivité et la violence de cet élève, qui perturbait aussi ses camarades. Le tout, sous la pression qui consiste à se taire, à ne rien dire et à tenir bon, sous peine d’être mal jugée".  Delphine, déstabilisée avoue se demander comment démêler la déficience du mauvais comportement.
Richard, psychologue scolaire, nous apprend que de tels comportements n'ont rien à voir avec la " nature " de l’élève. " Il s’agit d’une vraie maladie chronique qui se soigne".  Ces déficiences sont donc à prendre très au sérieux, car elles peuvent engendrer le pire : souffrance psychique extériorisée ou pas, sentiment de solitude poussé à l’extrême, issue tragique. " Ce qui fait que l'entourage et le malade lui-même ont tendance à penser qu’il ne s’agit que d’une mauvaise nature, c’est que bien souvent cette maladie est présente depuis l'enfance ou l'adolescence ", précise Richard. Pour mieux comprendre ces troubles et leurs manifestations, les participants de ce dossier ont dressé une liste de signes avant-coureurs.

Identifier un élève atteint d'un trouble

Avant toute chose, les témoins nous rappellent qu’il est toujours délicat de cataloguer les symptômes et que les déficiences sont d’autant plus complexes que les patients sont uniques. La maladie en elle-même devient visible généralement à l'adolescence ou au début de l'âge adulte. Il est cependant possible, durant l'enfance, d’assister à certaines manifestations. Plus tôt le trouble sera décelé, plus le traitement sera simple. Comment s’en apercevoir ? Tout simplement lorsque de façon répétée on se dit qu’un enfant se comporte de façon impulsive, incompréhensible ou méchante, dans ses relations. Inversement, il faut être attentif aux attitudes d’un scolaire replié sur lui-même, qui redouble d’effort pour ne pas se faire remarquer.
Autre manifestation, il arrive que de jeunes hommes ou de jeunes filles semblent totalement calmes et sociables, suite à un choc familial ou social. Il est important de toujours se demander si l’attitude de l’élève n’est pas trop en décalage avec le contexte dans lequel il évolue. En un mot, il est important de rester attentif aux appels au secours de ces jeunes malades qui peuvent s’exprimer de différentes manières : accès de rages, de colères ou bien expressions écrites, petites phrases en l'air, peintures, dessins, etc. Les signes sont nombreux, subtils et doivent conduire chez la personne qui les décrypte, à adopter un comportement adéquat.

Comment se comporter face aux troubles

Delphine, face au trouble du comportement d’un de ses élèves, s’est aperçue que rentrer dans le jeu de ce dernier n’apporte aucune aide. " C'est un cadeau empoisonné. En le laissant agir, je l'autorise à avoir une conduite que je n’admettrais pas d'une personne en bonne santé. Donc je le marginalise et je suis injuste vis-à-vis de la classe  ". En effet, ce n’est pas à la personne qui souffre de faire figure d’autorité. C’est au professeur d’affirmer les limites à ne pas dépasser. Quitte à ce que l’écolier se mette en colère où exerce des pressions affectives. " Il est toujours bon d’extérioriser ses sentiments, dans ce type de situation ", nous apprend le psychologue scolaire.
Il est important de bien faire comprendre aux jeunes gens et leurs camarades que leur maladie ne leur confère pas un statut spécial, comme celui qui autoriserait à répondre avec insolence, à être agressif ou violent en toute impunité. " Feindre le contraire, c'est nier les appels au secours. En agissant de la sorte, on amène le malade à maîtriser ses crises ", insiste Richard. Ce dernier rappelle qu’il faut toujours garder en tête que l’on a face à soi, une victime qui souffre et qu’il est donc important d’agir avec une certaine empathie.

Convaincre un élève de se soigner

Paradoxalement, c’est en plein pic de crise qu’il est le plus facile d’agir. " Plus un jeune est malade et plus il sera facile à soigner ", constate Richard. C’est à ce moment qu’il a le plus de difficultés à camoufler sa maladie. Sa vie devient infernale, la pression de l’entourage redouble. Ce n’est évidemment pas au professeur d’imposer les mesures, mais c’est le moment le mieux choisi pour pousser le jeune, via sa famille, à consulter un spécialiste.
Il arrive dans certaines situations que le patient soit ce que l’on appelle " fonctionnant maxi ". Il dupe son entourage et arrive plus facilement à passer entre les mailles du filet. Ce qui l’isole et le condamne davantage à d’importantes souffrances. " Le plus simple est d’expliquer à un enfant que l’on est conscient qu’il est malheureux, que l’on pense qu’il a un problème, que cela se soigne  ". conclut le psychologue scolaire. Ce dernier nous rappelle qu’il est évidemment impératif d’agir avec la complicité de la famille et qu’il faut se prémunir de toute précaution avec la direction de son établissement, afin de pallier le maximum de risques. Il est également possible de faire appel à d’autres professionnels dont l’expertise peut s’avérer d’un grand secours.

A qui faire appel ?

La plupart des écoliers atteints par ces troubles peuvent bénéficier d’une aide scolaire. Il en existe plusieurs. Parmi elles, le Réseau d'Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté (RASED). Bon nombre de professeurs déplorent l’extinction progressive de ce dispositif. Mis en place - puis menacé ces dernières années - par le ministère de l’Éducation nationale. Son avenir reste encore incertain à l‘heure qu’il est. Les RASED, regroupent trois types de personnel spécialisé : psychologue, éducateur et maître E. Ces derniers interviennent dans les écoles maternelles et élémentaires, pendant les heures scolaires. L’action des RASED contribue à assurer la prévention et pallier les difficultés chez les plus jeunes, en association avec les équipes pédagogiques.
Autre dispositif : le Programme Personnalisé de Réussite Educative, ou PPRE. Il s’agit d’une action spécifique d’aide qui peut-être coordonnée avec les membres du RASED et autres intervenants extérieurs. Même si l’enseignant de la classe en est le maître d’œuvre avec l’équipe pédagogique, le RASED peut y apporter son concours.
Une fois le diagnostic établi par un pédopsychiatre, l’adaptation de la scolarité peut se faire dans le cadre d’un Projet d’Accueil Individualisé. Le PAI traite d'une manière générale de l'accueil des enfants malades en collectivité. Médecins et psychologues scolaires en sont les véritables pivots. Ces derniers rencontrent l'élève et/ou sa famille, afin de cerner les difficultés de l'enfant. À partir des ordonnances et courriers médicaux, des observations de l’équipe éducative, il établit les aménagements spécifiques d'une partie du protocole.
Enfin, si les troubles sont tels que l’élève se retrouve en situation de handicap, les parents peuvent solliciter la mise en place d’un Projet Personnalisé de Scolarisation, le PPS. Ils adressent leur demande à la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) et peuvent prendre contact avec l'enseignant référent pour être informés avec précision de la marche à suivre.

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